TEXTE COMPLET PARAGRAPHE 1 PARAGRAPHE 2 PARAGRAPHE 3 PARAGRAPHE 4 PARAGRAPHE 5 PARAGRAPHE 6 PARAGRAPHE 7 PARAGRAPHE 8 PARAGRAPHE 9 VOCABULAIRE D’ÉPICURE

Vocabulaire moral d’Épicure

Aponie : absence de trouble du corps, absence de douleur caractérisant la santé physique.

Ataraxie : absence de trouble de l’âme, « tranquillité de l’âme », bien-être psychique. On peut l’assimiler à l’idée de sérénité ou à celle de plénitude.

Plaisir : sensation agréable, sentiment positif qui pour Épicure résulte de la satisfaction d’un désir. Le plaisir est « le bien primitif et conforme à notre nature ». Le plaisir a donc en soi une fonction morale (« tout plaisir est un bien et toute douleur un mal ». Mais le plaisir doit rester sous le contrôle de la raison (calcul des plaisirs) sans quoi il peut être cause de souffrance.
Dans d’autres sources que la Lettre à Ménécée, Épicure distingue le « plaisir en mouvement » (résultant de la satisfaction d’un manque ou de la suppression d’une douleur) qui est momentané puisque les besoins de manger, boire ou dormir reviennent régulièrement, du « plaisir au repos » qui, lui, est durable et correspond donc à l’ataraxie et caractérise le bonheur.

Désir : motivation à agir, qui détermine nos actions, en vue d’un objet dont l’obtention est source de plaisir. Le manque qui caractérise la naissance d’un désir est une forme de souffrance, une perte de la tranquillité de l’âme. Cette souffrance va durer tant que le désir n’est pas satisfait (frustration, stress). La plaisir qui accompagne la satisfaction du désir permet le retour à la tranquillité de l’âme.
Épicure propose une classification des désirs qui les soumet à sa morale eudémoniste. Les désirs vains, qu’il oppose aux désirs naturels et sont donc d’origine sociale, sont non seulement inutiles mais nous empêchent d’accéder au bonheur. Parmi les désirs naturels, certains ne sont pas nécessaires dans la mesure où ils ne sont pas utiles à notre bonheur. Les désirs naturels nécessaires sont donc les seuls que nous devons veiller à satisfaire puisqu’ils conditionnent la possibilité d’être heureux.

Eudémonisme : doctrine considérant le bonheur comme but ultime de la vie humaine, et donc comme « bien suprême » ou le « souverain bien ». L’eudémonisme constitue le fondement de toutes les morales développées dans l’antiquité grecque. Toute action humaine vise, même indirectement, à atteindre ou conserver le bonheur. De telle sorte que la recherche du plaisir ne fut jamais être une fin en soi, mais simplement un moyen en vue du bonheur. Dans la morale épicurienne, l’hédonisme est au service de l’eudémonisme.

Hédonisme : doctrine considérant le plaisir comme « bien suprême » ou « souverain bien », c’est-à-dire source de tous nos comportements et actions. En prenant en compte la distinction « plaisir en mouvement » / « plaisir au repos », on pourrait réduire la morale épicurienne à un hédonisme (puisque le bonheur correspond au « plaisir au repos »). Mais le statut subordonné des « plaisirs en mouvements » au « plaisir au repos » ainsi que le rejet à priori des « désirs vains » font de la morale épicurienne un eudémonisme pour lequel l’hédonisme (toujours critique) n’est qu’un moyen.

Fortune (= hasard) : concours de circonstances imprévisible ou trop complexe pour que l’on puisse le comprendre. La fortune sera qualifiée de « bonne fortune » quand elle favorise notre bonheur (on peut alors aussi l’appeler « chance »), et de « mauvaise fortune » dans le cas contraire (« malchance »).

Puisque le hasard est l’effet de causes que nous ne pouvons prévoir, nous n’avons aucune pouvoir sur lui.

Chez les Grecs, la fortune est personnifiée par la déesse Tyché (Fortuna chez les Latins). Épicure refuse cette conception irrationnelle des dieux, l’anthropomorphisme (le fait de leur attribuer une forme humaine) limitant l’idée de perfection qui doit déterminer la conception qu’on s’en fait.

Pour Épicure, il ne faut donc rien attendre du hasard, sans quoi on attendra notre bonheur d’événements sur lesquels nous n’avons aucune prise au lieu de travailler à le construire. Par contre, l’homme prudent, celui qui maîtrise la sagesse pratique, doit savoir saisir le hasard lorsqu’il se présente, l’occasion.

Nécessaire : désigne tout ce qui ne peut pas être autrement qu’il n’est. C’est le cas des lois de la nature et de tout ce qui en découle. La principe de causalité, qui pose que tout événement est l’effet de causes qui l’ont précédé, implique que tout événement advient par nécessité. D’un point de vue moral, cette notion est à rapprocher du fatalisme. Épicure désigne la nécessité causale comme « le destin des physiciens ». En effet, en permettant de justifier l’« argument paresseux » (ce qui est arrivé devait arriver »), l’idée de nécessité nie toute possibilité de liberté et donc de responsabilité.

Contingent : désigne tout ce qui peut être autrement qu’il n’est. C’est donc, au contraire de ce qui est nécessaire, tout ce qui peut dépendre de « notre pouvoir propre ». D’un point de vue moral, accepter cette notion c’est admettre une part de liberté dans les comportements humains et donc justifier notre part de responsabilité dans nos actions.
Dans la physique matérialiste d’Épicure, la nature n’est fondamentalement constituée que d’atomes et de vide. Mais puisque les atomes sont naturellement en mouvement dans le vide, les chocs qui interviennent nécessairement introduisent de la contingence (qu’on peut appeler hasard) qui devient la source de la constitution de toute chose, des plus simples aux plus complexes (jusqu’aux êtres vivants).

Fatalisme : doctrine considérant que tout événement est prédéterminé par une causalité nécessaire. Du point de vue moral, le fatalisme conduit à une négation de la liberté, et donc un renoncement à l’idée de construire soi-même son bonheur et à se résigner en cas de « mauvaise fortune ». En tant qu’outil de l’autodétermination, de l’autonomie de pensée, l’usage de la raison est alors parfois dévalorisé au profit de toutes formes de superstitions (voyance, astrologie, etc.). « Ce qui arrive devait arriver » est qualifié par ceux qui s’opposent au fatalisme d’« argument paresseux » puisqu’il justifie le refus d’agir par soi-même, l’irresponsabilité morale (la responsabilité des événements étant attribuée au destin).

Prudence (ou sagesse pratique) (phronésis) : c’est l’usage acquis de la raison dans le domaine de l’action. Épicure la définit comme « le principe du raisonnement vigilant » appliqué au choix de nos actions. La prudence est donc à placer au-dessus de la philosophie (la philosophie en est un produit) puisqu’elle est la « source de toute les vertus », les vertus étant définies comme les qualités humaines permettant d’atteindre et de conserver le bonheur.

Tétrapharmakon (quadruple remède) : ensemble des quatre préceptes permettant de condenser la morale d’Épicure : 1/ Les dieux ne sont pas à craindre – 2/ La mort n’est pas à craindre – 3/ Le bonheur est facile à obtenir – 4/ La souffrance est facile à supporter
Ces quatre préceptes visent d’une part à nous libérer des angoisses qui empêchent d’être heureux (les craintes induites par de « vaines croyances ») et d’autre part à nous stimuler dans la recherche du bonheur. La prise ne compte du tétrapharmakon est un moyen d’atteindre l’ataraxie.

Autosuffisance (ou autarcie) : capacité de se suffire à soi-même. Faire dépendre des dieux, du hasard, des autres, de la richesse ou autres, notre bonheur, c’est le mettre hors de portée de notre volonté. En maîtrisant tout ce qui est nécessaire pour atteindre et conserver notre bonheur, nous nous assurons de pouvoir le conserver aisément, indépendamment de tous les aléas de la vie.